Ce qui prend du temps.
« En étant malade toute une semaine, ton cerveau peut commencer à penser, penser un peu trop, puis à force, tu te retournes de l’autre côté du lit pour essayer de chasser des pensées, qui reviennent devant ton visage, quel que soit le moment. »
Je suis retombée sur des images de moi d’il y a 6 ans à peine.
C’est incroyable à quel point je ne me reconnais pas sur ces photos.
J’ai du m’asseoir, parce que même en plissant des yeux, j’avais du mal à m’identifier à la fille sur le papier.
La différence entre moi et plein de gens, c’est que je ne me suis pas changée toute seule. On m’a changé plus ou moins fort la forme du visage, la nature n’a pas eu son mot à dire.
Je suis bien plus jolie qu’avant, avec une dentition plus viable, j’ai un sourire entier marqué de trois implants, mes mâchoires ont été avancées, un petit trou sur ma joue gauche là où j’avais ma tumeur il y a quatre ans de ça.
Toujours du mal à sentir certaines parties de mon visage, la sensibilité ne reviendra plus de toute façon.
C’est spécial.
Mon corps a du mal à se remettre par moments.
Chaque fois que je suis faible, j’accepte moins bien la défaite.
Quand je doute, je me trouve laide, comme si j’avais un masque sur le visage.
La chirurgie ne change jamais tout si l’on ne croit pas au chemin que l’on entreprend.
J’ai plutôt eu l’impression d’être balancée d’un service à l’autre, de traîner un dossier gros comme ça derrière moi parce que mon cas demandait l’expertise de plusieurs praticiens.
Mon cas sera toujours moins pire que celui de gens qui sont hospitalisés à plein temps, d’enfants malades.
Je faisais surtout ce billet pour interroger les personnes sur la réelle utilité de la chirurgie en général, plastique en particulier, parce que quoi qu’il arrive cela change un corps définitivement, et laisse une empreinte qui colle réellement à la peau.
C’est toujours un long chemin, les effets peuvent se faire attendre, ne jamais venir.
Cela fait presqu’un an que je me suis faite opérer d’une sinusite chronique, j’ai encore un an à tirer à me pshitter les narines.
Pour éviter que ça ne revienne.
Que ça n’empire.
J’ai déjà passé presque 7 ans de ma vie avec tout ça, et parfois ça pèse un peu trop lourd sur mes 24 ans.
Faudrait que ça me rende plus forte.
Je suis sûrement plus forte qu’avant.
[illustration de Temujin Doran]
Caribouland
C’est marrant, hier aussi, je suis retombée sur de vieilles photos, et je ne me suis pas reconnue. Cette fille avait l’air d’une étrangère….
Cet article m’a beaucoup touchée… Je trouve que tu écris très bien. Je n’ai pas les mots idéaux pour y répondre, en tout cas je voulais juste te souhaiter bon courage. Le pire est derrière toi? Mais j’imagine que même si c’est le cas c’est peut-être justement les pshitts et les vieilles photos qui finissent par créer un ras-le-bol, une impatience des résultats, ça tire en arrière et ça fait peur… Enfin je vais me taire car je suis sûre que je ne réponds pas vraiment à toutes les pensées que tu avais en écrivant cet article. Quant à l’utilité de la chirurgie, hmmm…Vaste question!!
En tout cas c’est sûr, à 24ans tu as vécu beaucoup plus que beaucoup d’autres, et tu es plus forte qu’avant, mais moins que demain…